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Joseph Allard, de Tarascon résidant aux Roches : contre-révolutionnaire ou honnête citoyen ?

Le vendredi 28 mai 2021, par Michel Guironnet

Joseph Allard, chaudronnier habitant aux Roches, est-il un contre-révolutionnaire ? En 1794, le comité de Tarascon, sa ville natale, lance un mandat d’arrêt contre lui. Mais "l’individu signalé" s’enfuit, laissant sur place "sa malle et autres effets".

Pourtant, quatre ans plus tard, Joseph est qualifié d’ "honnête citoyen se conformant aux lois" et obtient son précieux certificat de résidence aux Roches.

Au comité de surveillance révolutionnaire de Vienne la Patriote [1] ; pendant la séance du 28 prairial An II (16 juin 1794) ; lecture est faite d’une lettre du comité de Tarascon, accompagné d’un mandat d’arrêt contre Joseph Allard, chaudronnier, contre-révolutionnaire de Tarascon. Cet ordre est remis au capitaine de gendarmerie Gonnet qui se transporte avec sa brigade aux Roches-de-Condrieu. L’individu signalé qui venait habituellement coucher dans ce village a probablement été averti, car il n’a pas reparu. Sa malle et autres effets à lui ont été saisis et remis au comité de surveillance des Roches ainsi que copie du mandat d’arrêt.

Pourtant, quatre ans plus tard, de nouveau domicilié aux Roches, ce même Joseph Allard, en tant qu’"honnête citoyen se conformant aux lois" obtient son "certificat de civisme" [2] !

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Certificat de résidence pour Joseph Allard

« Du vingt huit ventôse an sixième de la République française (18 mars 1798), l’administration municipale du canton de Chonas s’est assemblée dans la maison commune à Chonas à neuf heures du matin »
« …sur l’attestation des citoyens Etienne Tonneyrieux Maréchal, Etienne Viallet, marchand en détail, et Claude Tonneyrieux, marchand ; tous trois patentés domiciliés dans la commune des Roches ;
certiffions que le citoyen Joseph Allard, natif de Tarascon, âgé de quarante ans, chauderonier de profession, patenté ; taille de cinq pieds quatre pouces et demi, cheveux et sourcils châtains, yeux bleus, nez long, bouche moyenne, menton rond, front large, visage rond et plein ; demeure au lieu des Roches et qu’il y réside et y a résidé sans interruption depuis le six nivôse an 6 (26 décembre 1797) jusqu’à ce jour, qu’il s’y est comporté en honnête citoyen en se conformant aux lois, n’ayant séjourné dans la dite commune que pour son commerce.
En témoins de quoi l’administration a délivré au citoyen Allard le présent certificat de résidence qui a été signé aussy par lui que par les trois certificateurs. Etienne Thonnerieux, Claude Thonnerieux, E.Viallet cadet, Joseph Allard »

J’ai retrouvé son acte de baptême, paroisse Sainte Marthe à Tarascon, du 26 décembre 1757. Il est le fils de Nicolas Allard et de Pierre ? Nove.

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Baptême de Joseph Allard
Archives municipales de Tarascon

Il se marie le 28 décembre 1778 à Tarascon avec Françoise Pelissier. Baptisée le 24 octobre 1757 à Tarascon, elle est la fille de Jean Pelissier et de Françoise Mathieu. Ils ont donc une trentaine d’années lorsque la Révolution éclate.

Qu’est-ce qui peut expliquer la présence de Joseph Allard aux Roches ? Il est encore à Tarascon en février 1792, figurant sur une liste de 200 jurés départementaux [3].
Est-il possible d’en savoir plus sur cette dénonciation de 1794 qui l’a obligé à fuir de son village d’accueil ? En tous cas, il est revenu aux Roches de Condrieu et semble y vivre paisiblement au moins depuis fin 1797 avant de retourner "au pays".

Sollicitées, les archives municipales de Tarascon m’ont répondu que leurs fonds ne contiennent rien sur les circonstances de la dénonciation de Joseph Allard et de sa fuite. Comme me le conseillent les archives départementales, il faudrait rechercher dans les fonds du district de Tarascon, des comités de surveillance, des sections et des sociétés populaires. Ce qui impose de se rendre sur place.

Françoise Pelissier meurt à Tarascon le 6 juin 1806. Joseph décède à Tarascon le 17 août 1820 à 63 ans. D’après les registres de l’enregistrement, sa seule héritière est sa fille Anne, née le 4 pluviôse An II (23 janvier 1794), mariée le 11 octobre 1809 avec le "droguiste" Jean Joseph Drujon. Elle meurt à 31 ans le 21 avril 1825.

Ses descendants ont-ils conservés des documents inédits sur cet épisode ?


[1Documents dauphinois. V, Procès-verbaux du Comité de surveillance révolutionnaire de Vienne-la-Patriote (31 mars 1794 au 21 mars 1795) publiés en 1888 par un vieux bibliophile dauphinois (Eugène Chaper)

[2Délibérations de la municipalité de canton de Chonas L 1274 (folio 101) archives de l’Isère

[3Renseignement donné par la réponse de juillet 2018 des archives départementales des Bouches du Rhône (L 63)

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9 Messages

  • rouen 28 mai 2021 14:11, par martine hautot

    Bonjour ,votre chaudronnier remplissait les conditions (âge et fortune ) pour sièger à la cour criminelle départementale des Bouches du Rhône créée en 1792, mais les affrontements étaient particulièrement violents pendant la révolution dans ce département.A Tarascon 33 personnes ont été déférés devant le tribunal révolutionnaire .Joseph Allard a dû se sentir menacé et comme à Tarascon on emprisonnait dans le château avant de guillotiner à tout va ,il a préféré devancer l’arrestation en se réfugiant dans un lieu qu’il croyait plus tranquille , aux Roches. Apprenant que ses ennemis de Tarascon avait retrouvé sa trace ,il est parti plus loin ,aprés la chute de Robespierre en 1794 ,retour aux Roches où il n’avait pas d’ ennemis ! puis plus tard dans sa ville natale
    Cordialement,
    Martine
    .https://www.persee.fr/doc/ahrf_0003-4436_2007_num_350_1_3141

    Répondre à ce message

    • rouen 28 mai 2021 16:09, par Michel Guironnet

      Bonjour Martine,

      Un grand merci pour votre "explication de texte" accompagnée d’un bel article très complet...et avec plein de références dans les archives locales à exploiter !
      Je vais le relire de façon plus approfondie...mais pourquoi Joseph Allard se réfugie t’il aux Roches ?
      Il doit y connaitre quelqu’un de sûr...

      A suivre :’-))

      Cordialement.
      Michel

      Répondre à ce message

      • rouen 29 mai 2021 09:28, par mhautot

        Bonjour,Michel

        Peut-être de la famille dans le coin :en 1793 il y a à Condrieu un Claude Allard qui donne quittance à un Antoine Bret :documents notariés trouvés dans geneanet .Ce Claude est-il celui marié à Marie Jeanne Plantier et qui vie à Vienne ? une piste à vérifier ,du travail pour le week-end ...
        Cordialement,
        Martine

        Répondre à ce message

        • rouen 29 mai 2021 09:52, par Michel Guironnet

          Bonjour Martine,

          Merci.
          Effectivement, votre piste mérite d’être vérifiée...Moi qui avais peur de m’ennuyer :’-))

          Je vous tiens au courant de mes investigations.
          Cordialement.
          Michel

          Répondre à ce message

          • rouen 30 mai 2021 07:09, par Michel Guironnet

            Bonjour Martine et à tous,

            A l’époque de "notre" Joseph, les Allard sont nombreux à Vienne et à Reventin, village à quelques kilomètres seulement des Roches de Condrieu où il trouve asile.
            Entre autres : Claude Allard est armurier époux de Jeanne Marie Plantier ; Jean Jacques Allard "homme de loy domicilié à Vienne" posséde une "maison située à La Balme, section de Reventin". C’est là que sa femme Agathe Glasson accouche de sa fille Anne Victoire en juin 1798...
            Mais à ce jour je n’ai trouvé aucun lien avec les Allard de Tarascon.

            Nicolas Allard, le père de Joseph, marié le 20 mai 1748, paroisse Ste Marthe de Tarascon avec Pierre ! Nove (vue 15/33)est alors déjà chaudronnier. Jeanne, leur fille, épouse à Tarascon en 1768 le chaudronnier Pierre Perret...Comme dans beaucoup de familles d’artisans, on se marie entre gens du même métier !

            Il semble peu probable qu’un Allard de Tarascon soit venu, longtemps avant la Révolution, faire souche en Viennois.

            Peut être que la présence de Joseph Allard aux Roches s’explique par un "déplacement professionnel" ?
            Le mandat d’arrêt contre lui lancé depuis sa ville natale, s’il est retrouvé un jour, pourra nous éclairer.
            Je vais éplucher les actes d’état-civil des Roches entre 1793 et 1798...peut être sa signature dans les registres nous en dira plus !

            Cordialement.
            Michel

            Répondre à ce message

            • rouen 31 mai 2021 18:31, par Michel Guironnet

              Bonsoir,

              Mon intuition était bonne !
              Joseph Allard, chaudronnier de 36 ans, est témoin de deux mariages aux Roches de Condrieu : le 13 ventôse an II (3 mars 1794) et le 7 floréal an II (26 avril 1794)
              Sa signature est bien reconnaissable.
              Son nom n’apparait plus ensuite dans les registres.
              Sa présence aux Roches est donc attestée quelques semaines avant la date du mandat d’arrêt contre lui (16 juin 1794).

              Piste à creuser : quelques jours plus tard, le 5 messidor an II (23 juin 1794) a lieu aux Roches le mariage d’Etienne Viallet et de Marie Plasson. Celle-ci est âgée de 23 ans, fille "de défunt François Plasson et de Reine Taviand, habitante à Tarascon" !

              Joseph n’est pas présent alors car il doit déjà être en fuite.

              Ce sont des familles des mariniers, "patron sur le Rhône" ou "voituriers par eau"
              Et ils descendent souvent dans le Midi avec leurs barques pour leur commerce.

              A suivre...

              Cordialement.
              Michel Guironnet

              Répondre à ce message

  • Bonjour Michel

    Comme disait un homme politique récent que l’on moquait pour ses ralliements successifs, ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent...
    Dangereux en juin 1794, un mois avant la chute de Robespierre, il redevient acceptable après..
    Le capitaine Bonaparte a été emprisonné après la chute de Robespierre, puis ça s’est tassé et il a repris sa carrière.
    Il y a les régionalismes, il me semble que cette région était restée royaliste, comme la côte d’azur...
    Et en juin 1794, il en fallait très peu pour être recherché, à Arras sous le commissaire Lebon, les condamnations à mort étaient surréalistes...
    Cordialement
    Thierry

    Répondre à ce message

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