"Transportés à Azolette pour y être inhumés"
Antoine DECORGIER (ou CORGIER selon les actes) est l’époux de Louise COCHARD. Mariés à Propières le 6 août 1726, Antoine est le fils de Claude , charpentier de Belleroche, et de Jeanne VERMOREL. Il serait né vers 1707.
Louise COCHARD est la fille "de feu François COCHARD, de son vivant meunier à Propières" et de Jeanne DELACOMBE. Elle serait née vers 1711.
Un de leurs enfants, « Pierre, fils légitime d’Antoine DES CORGIER, meunier, et de Louise COCHARD son épouse » est baptisé le jour même de sa naissance le 20 mars 1736. Le 17 novembre 1738 naît à Propières un autre de leurs garçons également prénommé Pierre. Baptisé le même jour, son parrain est Pierre BOTTON et sa marraine Nicole ODIN, sa femme.
Quelques pages plus loin, on relève cet acte dans les registres paroissiaux :
« Louise COCHARD, femme d’Antoine DESCORGIERS, habitant de la paroisse de Propières, âgée d’environ vingt sept ans, munie de ses sacrements, est décédée le vingt deuxième de novembre mil sept cent trente huit. »
Le 22 novembre 1738, c’est à dire huit jours après avoir accouché de son fils Pierre ! A l’époque, les femmes meurent souvent jeunes des suites de leurs couches.
L’acte précise que le lendemain, elle « a été transportée dans le cimetière de la paroisse d’Azolette pour y être inhumée ». |
- Vierge à l’enfant
- Façade de l’église d’Azolette
Pourquoi enterrer Louise COCHARD dans la paroisse voisine et non à Propières ? La réponse est donnée par une lecture attentive des registres paroissiaux du village.
Claudine BOTTON, décédée à cinq ans le 13 septembre 1738, est bien inhumée dans le cimetière de Propières. Même procédure pour Etienne ODIN inhumé le 21 septembre. Par contre, pour Nicolas DUMOULIN, quatorze ans, mort le 6 octobre 1738, son corps « est apporté à l’église paroissiale dudit Propière... les cérémonies requises en pareil cas ont été faites, présent le cadavre. Ensuite on a transféré ledit cadavre à la paroisse d’Azolette pour y être inhumé, le cimetière de Propière se trouvant interdit.. »
- "Un enfant mâle appartenant..."
- 11 octobre 1738 vue 11/13 BMS de Propières (161 GG 1 archives du Rhône)
C’est la même cérémonie pour « un enfant mâle... (né le 10 octobre 1738) ayant été ondoyé à cause du péril de mort par Benoît LIEVRE... ledit enfant a donné véritablement des signes de vie, est décédé un moment après. »
« Les cérémonies requises en pareil cas » ont lieu le 11 octobre, puis le cadavre est inhumé à Azolette, le cimetière de Propières « se trouvant interdit » .
On relève cette mention de "cimetière interdit" sur les actes de sépulture de Benoit ACHAINTRE et Antoine LAGARDETTE, transportés eux aussi les 19 et 25 octobre à Azolette. Les cinq sépultures suivantes [1] sont toutes inhumées à Azolette, mais sans la précision du cimetière interdit.
Retour à la normale fin novembre : pour l’enterrement de Jeanne CINQUIN, le 28 novembre 1738, et celui de Pierre THEVENON, le 2 décembre 1738, il est de nouveau noté « enterré dans le cimetière de Propières ».
Presque deux mois d’interdiction d’utilisation du cimetière de Propières. Mais pourquoi ?
« L’interdit est une censure par laquelle l’Église défend l’usage des sacremens, les divers offices en public & au son des cloches, & la sépulture ecclésiastique, pour punir des désobéissances notables & scandaleuses. Cet interdit est ou local, ou personnel, ou mixte, ou général, ou enfin spécial. L’interdit local est celui qui ne tombe que sur les lieux. Par exemple, quand on défend de célébrer les offices divins dans une église, d’enterrer dans un cimetière. Si c’est une église, alors les habitans doivent aller à l’office ailleurs. Si c’est un cimetière, il faut chercher une autre sépulture. » [2] |
« L’évêque peut porter des interdits particuliers, locaux ou personnels... mais seulement sur le territoire ou le peuple d’une paroisse... Un interdit local général demande une cause très grave, un délit spécialement fâcheux, et qui soit en quelque sorte le fait de la communauté... L’interdit local atteint tous les fidèles qui se trouvent dans ce lieu... Quand une église est interdite, le cimetière ne l’est pas... L’interdit dont est frappé un cimetière atteint tous les oratoires installés dans ce cimetière mais non l’église qui lui est contiguè... Si un cimetière est interdit, on peut cependant y enterrer les fidèles, mais sans aucun rite ecclésiastique. On se contente de faire à l’église les obsèques et de conduire le corps à l’entrée du cimetière » [3]
Aussi, pour éviter d’être enterré sans cérémonies au cimetière interdit, les paroissiens sont enterrés dans le cimetière voisin. Ainsi ils peuvent bénéficier des prières de l’Eglise, jointes à celles des fidèles qui les accompagnent à leur dernière demeure. « L’interdit local » ne cesse que par l’intervention du supérieur qui l’a portée, lui seul peut lever la sanction.
- Château du Plumet à Azolette
Mes ancêtres CORGIER-BRIDAY
Antoine CORGIER se marie en secondes noces avec Claudine LIEVRE le 16 mai 1741 à Propières. Il est bien précisé dans l’acte, cela aura son importance, « veuf de Louise COCHARD ».
Quatre ans plus tard, dans les registres paroissiaux de Saint Igny de Vers, le vicaire DESFORGES rédige cet acte de mariage :
« Le mardy vingt un juin mil sept cent quarante six (21 juin 1746), après les fiançailles ratifiées en cette église et les publications de bans y faittes et en celle de Propierre, sans oppositions, ni réclamations d’empêchements canoniques ou civils, Antoine DESCORGIERS, laboureur de la paroisse de Propierre, veuf de Louise COCHARD, et Antoinette BRIDAY, fille de Pierre BRIDAY et de Pierrette BUISSON, procédant de l’authorité desdits BRIDAY et BUISSON ses père et mère de la paroisse de Saint Igny de Vers ; ont reçus la bénédiction nuptiale.
Présents Louis BOTTON, Pierre COLLON, Claude LIEVRE, tous de la paroisse de Propierre et Jacques DUMOULIN de St Igny de Vers, qui se sont soussignés avec nous, et non les dites parties pour ne le scavoir, enquis... »
Ce sont donc ses troisièmes noces pour Antoine DESCORGIERS...A noter que l’acte oublie complètement Claudine LIEVRE, décédée à Propières le 26 octobre 1741. Antoinette BRIDAY est native du village le 9 juin 1720. Elle a donc vingt six ans depuis quelques jours.
Antoine CORGIER et Antoinette BRIDAY ont cinq enfants, tous nés à Propières :
1/ Antoinette, [4]
2/ Claudine,... « a été baptisée à Azolette », ainsi que l’indique une mention du curé de Propières entre un baptême du 12 et un enterrement du 19 février 1749.
Effectivement on trouve à Azolette : « Claudine, fille légitime et naturelle d’Antoine CORGIER et d’Antoinette BRIDAY est née et a été baptisée le quinzième février mil sept cent quarante neuf. Son parrain a été Jean CORGIER de Belleroche, sa marraine Claudine BRIDAY, tous de Propière, qui n’ont signé, de ce enquis, CHRISTOPHLE curé. »
C’est elle qui épousera en octobre 1774 notre ancêtre Claude VALENTIN. Elle est probablement baptisée (avec dispense) en dehors de sa paroisse pour des raisons de proximité entre le Moulin Cochard et Azolette et aussi de mauvaise saison. En février la neige est fréquente en Haut Beaujolais. Peut être l’enfant nouveau-né est-elle de constitution fragile, donc en danger de mort ? |
3/ Pierre, [5] 4/ Claudine, [6] 5/ Benoîte, [7]
C’est la dernière naissance du couple CORGIER/BRIDAY, trois mois après le décès de son père. En effet, un Antoine CORGIER décède à quarante huit ans le 23 janvier 1755 à Propières. Il s’agit fort probablement du mari d’Antoinette BRIDAY, Antoinette alors enceinte de six mois. Sont présents Claude CORGIER, peut être son fils, et « autre Claude, son neveu », un fils de son frère.
- Le hameau du Vermorel à Propières
- C’est là que le couple Valentin Corgier s’établit dès 1777, venant de Cours.
Antoinette BRIDAY survit longtemps à son mari.Il existe un doute sur la date de son décès. A Propières, le 3 novembre 1765, à quarante ans, meurt une Antoinette BRIDAY sans autre précision. Le 19 octobre 1772 on enterre, âgée de cinquante ans, une autre Antoinette BRIDAY. Laquelle est la veuve d’Antoine CORGIER ?
Toujours est-il que ses deux parents sont décédés lorsque Claudine CORGIER, mon ancêtre, se marie.
Déjà le 21 juin 1774, pour se marier à Propières avec Etiennette GRANDJEAN [8]Pierre CORGIER son frère, « fils des défunts Antoine CORGIER et Antoinette BRIDAY, de leurs vivants laboureurs à Propières » a besoin « de l’autorité de Benoît SAMBARDIER son tuteur ad hoc, de la paroisse de St Igny de Vers ». De leur union naît Jeanne Marie le 27 octobre 1775, baptisée le lendemain à Propières.
Pierre CORGIER, « muni des sacrements nécessaires... », meurt le 13 décembre 1775, il n’a pas plus de vingt quatre ans [9]. Sa fille Jeanne Marie meurt à un an et demi le 19 mai 1777 à Propières.
La branche CORGIER-JUGNET
Immédiatement après l’acte de mariage CORGIER-BRIDAY du 21 juin 1746, cet autre mariage :
« Le même jour et an que dessus iceluy, Claude DESCORGIERS, fils d’Anthoine DESCORGIERS, laboureur et habitant de la paroisse de Propierre, de son père dûement authorisé et renvoyé par Messire VEDEAU, curé de Propierre ; et Pierrette JUGNET, fille de déffunt Benoît JUGNET, laboureur de la paroisse de St Igny de Vers, et de Jeanne BRIDAY sa mère, dûement authorisée, après les publications des bans faittes en cette église ; et les fiançailles en icelles, ratiffiées sans oppositions ni réclamations d’empêchements canoniques ou civils, ont reçus la bénédiction nuptialle.
Présents Etienne CORTEY, Benoît SAMBARDIER, Benoît DEBORDE Not (notaire ?) et autre Benoît SAMBARDIER qui se sont soussignés avec nous et non les dites parties pour ne le scavoir, enquis... »
Antoine et Claude DESCORGIERS sont certainement le père et le fils, Claude étant probablement né le 21 janvier 1732 du 1er mariage d’Antoine avec Louise COCHARD. |
Claude CORGIER et Pierrette JUGNET ont huit enfants, tous nés à Propières :
1/ Antoinette, [10] 2/ Benoît, [11] 3/ Claude, [12] 4/ Louis, [13] 5/ Benoîte, [14] 6/ Pierrette, [15] 7/ Jeanne Marie, [16] 8/ Jean Marie, [17]
Claude CORGIER est mort avant 1783, puisque lors du mariage de son fils Claude (né en 1758) avec Jeanne DENOYER le 20 février, il est dit de lui « de son vivant meunier à Propières ». Il ne s’agit probablement pas de lui quand est enterré un Claude CORGIER, pourtant « meunier à Propières », à trente cinq ans le 10 avril 1773. Il serait né vers 1738, marié en 1746 il aurait son premier enfant en 1753 à quinze ans !
Pierrette JUGNET, elle, est présente au mariage de son fils « de l’autorité de laquelle il procède... » Il n’a pas encore vingt cinq ans. J’ignore la date de son décès.
Merci à mes "cousins" du Haut-Beaujolais de m’apporter précisions et compléments sur ces branches ancestrales.
Pour en savoir plus :
https://www.histoire-genealogie.com/-Chez-nos-ancetres-en-Haut-Beaujolais-